La première page du coffret/livret
(dernier album d'Alain Bashung, "Bleu pétrole")
Extrait du travail universitaire "Le mouvement folk en France 3sur4" en pdf
Mick Larie et Jean-Marie Redon.
Deux personnalités charismatiques du bluegrass français.
Né en 1948 à Neuilly-sur-Seine, Jean-Marie Redon, pied-noir d'origine, passe son enfance
en Algérie. La situation politique algérienne du début des années soixante conduit la famille
Redon à Paris, où Jean-Marie découvre plusieurs genres musicaux qui le fascinent, à
commencer par le Rock & Roll, puis la musique de Ray Charles, et enfin le jazz New-
Orleans.
A 13 ans, le jeune homme se met à la guitare, en autodidacte, et fonde avec
quelques potes du lycée un groupe de rock, les Dunce's — les « Cancres ». En 66, la vague
du folksong déferle sur la France ; Dylan, Peter Paul & Mary donnent à Jean-Marie l'envie de
se lancer dans l'aventure folk et de créer un « skiffle » — groupe de musiciens ne jouant
que d'instruments à cordes — dont le chanteur n'est autre que Alain Bashung. La démarche
de la formation, qui reprend des chansons de folksingers, s'apparente au travail entrepris par
Hugues Aufray, dont l'album Aufray chante Dylan vient de sortir. Cette expérience de trois
ans s'achève lorsque Bashung décide de créer un style beaucoup plus personnel. De son
côté, Jean-Marie part à la conquête des musiques américaines par le biais de disques
importés des Etats-Unis et ne se lasse pas de découvrir qu'il existe, au-delà du folksong, des
merveilles comme le blues mais aussi le bluegrass, que l'on qualifie à l'époque de musique
« moderne ». Débute alors une grande aventure et une passion partagée avec un ami du
lycée, Mick Larie : ces « fous » de bluegrass traverseront les années 70 côte à côte,
navigant d'un groupe de bluegrass à l'autre. Ils débarquent au Centre Américain, flanqués
d'une guitare et d'une mandoline — Jean-Marie ne joue pas encore de banjo — et
participent avec la petite bande des « américanophiles » à la création du TMS (voir à TMS).
Incombent régulièrement à Jean-Marie et à Mick la tâche d'assurer les permanences du folkclub.
Jean-Marie se souvient : « Comme tout le monde, je garde de l'époque du TMS une
nostalgie incroyable ; c'était une époque fantastique où tout paraissait possible, tout roulait
automatiquement. » Et pour preuve la manière dont en 1968 Claude Lefebvre, pourtant
excellent guitariste, propose aux deux bluegrasseux débutants, le plus modestement du
monde, de fonder un groupe aussitôt baptisé Bluegrass Flingou 37 1/2. Ce nom atypique
provient, en fait, d'un délire collectif. « Flingou » était le nom de l'idiot du village de
Charentes-Maritime où Mick passa son enfance, tandis que « 37 1/2 »" était la réponse qu'ils
avaient pour coutume de faire à une question ennuyeuse. S'ajoute au groupe le bassiste Eric
Bouillet. Les motivations de la formation sont simples : réunir un ensemble de musiciens de
bluegrass, ce qui, à l'époque, ne va pas de soi, le genre étant peu développé en France.
Avec Claude à la guitare, Mick à la mandoline et Eric à la basse, Jean-Marie n’a d’autre
choix que de se mettre au banjo : « Le banjo, j'y suis arrivé un peu par hasard. C'était un
instrument que j'aimais bien pour l'avoir entendu dans les disques de bluegrass, mais je
n'avais jamais vu personne en jouer, je ne savais pas comment ça pouvait fonctionner.
Jusqu'au jour où on a eu besoin d'un banjo dans le groupe et où l'on m'a dit : toi, tu fais un
peu de picking à la guitare, donc tu vas te mettre au banjo. » Le premier banjo de Jean-
Marie est un six cordes auquel il en retire deux car, à l'écoute des disques, il lui semble que
le bluegrass se joue à quatre cordes. Son apprentissage de l'instrument est on ne peut plus
expérimental : il passe les disques en boucle, au ralenti, et s'échine à reproduire des
sonorités identiques. Il découvre, par la suite, l'unique magasin de musique parisien
spécialisé en banjo, « Disque et musique », et achète un cinq cordes...